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Simone Peterzano (Bergame 1535 - Milan 1599 )

(Bergame, c. 1535 – Milan, 1599 )

Angélique et Médor

Huile sur toile, 154,8 x 194 cm.

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DESCRIPTION


Provenance : Milan, collection Gerolamo Legnani (1587) ; Milan, collection particulière en 1944-45 ; New York, collection particulière ; Campione d’Italia, collection Silvano Lodi. Bibliographie : - Giovan Paolo Lomazzo, Rabisch, Milan, ed. Isella, Turin, 1993, p. 153-154, n° II 36 ; - Wart Arslan, « Nota caravaggesca », in Arte Antica e Moderna, 1959, p. 196-197 ; - Maria Teresa Fiorio, « Note su alcuni disegni inediti di Simone Peterzano », Arte Lombarda, 40, 1974, p. 88-89 ; - Edi Baccheschi - Maurizio Calvesi, « Simone Peterzano », I Pittori bergamaschi dal XIII al XIX secolo. Il Cinquecento IV, Bergame, 1978, p. 476, 480, 533, n° 20 ; - Frank Dabell, in Important Old Master Paintings. Within the Image, Piero Corsini, Inc., New York, 1990, p. 50, repr. ; - Mina Gregori, « Simone Peterzano », in Michelangelo Merisi da Caravaggio. Come nascono i capolavori, cat. exp. Florence-Rome, 1991, p. 62 ; - Mina Gregori, « Sul venetismo di Simone Peterzano », Arte Documento, 6, 1992, p. 263-269; - W. W. Bracken, M. Roy Fisher Fine Arts. A selection of Old Master Paintings and Sculptures, New York, 1993, p. 26-29 ; - Maria Teresa Fiorio, in Rabisch. Il grottesco nell’arte del Cinquecento, cat. exp. Lugano, Museo Cantonale d’Arte, 28 mars - 21 juin 1998, p. 284-285, n° 105 ; - Robert S. Miller, « Simone Peterzano in Milan : Contracts for Frescoes in San Maurizio and San Francesco Grande and other Documents », Paragone, nov. 1999, n° 597, p. 92, fig. 72 ; - Maria Teresa Fiorio, « La controfacciata di Simone Peterzano », in Bernardino Luini e la pittura del Rinascimento a Milano, Milan, 2000, p. 100, 101 (repr.), 103 ; - Mina Gregori, « Un amico di Simone Peterzano a Venezia », Paragone, janv.-mars 2002, n° 41-42, p. 25, fig. 29.; - Pietro C. Marani, « Paesi e paesaggi nel cinquecento italiano : alcuni esempi dalla documentazione iconografica e letteraria e qualche apertura sul Seicento », in La Pittura di paesaggio in Italia. Il Seicento, a cura di Ludovica Trezzani, Milan, 2004, p. 134, 137-138, fig. p. 131 ; - Véronique Damian, Autour de Titien. Tableaux d’Italie du Nord au XVI, catalogue de l’exposition, Paris 2005, p. 38-43; - Gianni Papi, “Brevi note sull’attività giovanile del Caravaggio”, exh. cat. Caravaggio ospita Caravaggio, Mina Gregori et Amalia Pacia (dir.), cat. exp. Milan, Brera, 17 Janvier – 29 Mars 2009, p. 26-27; - Simone Peterzano e i disegni del Castello Sforzesco, ca. 1535-1599, Francesca Rossi (dir.), cat. exp. Milan, Castello Sforzesco, 15 Décembre – 17 Mars 2013, p. 92, fig. 10a; - Federica Caneparo, I Volti dell’Ariosto. L’Orlando furioso e le arti, cat. exp. Tivoli, Villa d’Este, 15 June – 30 October 2016, p. 218-219, n° 42. Expositions : - Rabisch. Il grottesco nell’arte del Cinquecento, cat. exp. Lugano, Museo Cantonale d’Arte, 28 mars - 21 juin 1998, p. 284-285, n°105. - Caravaggio. La luce nella pittura lombarda, cat. exp. Bergamo, Accademia Carrara, 12 avril- 2 juillet 2000, p. 181, n° 6. - Autour de Titien. Tableaux d’Italie du Nord au XVIe siècle, exh. cat. Paris, galerie Canesso, 2005, p. 38-43. - I Volti dell’Ariosto. L’Orlando furioso e le arti, exh. cat. Tivoli, Villa d’Este, 15 Juin – 30 Octobre 2016, p. 218-219, n° 42. Œuvres en rapport : Dessins : trois dessins préparatoires pour les figures de Médore et des guerriers allongés au sol (Milan, Civico Gabinetto dei Disegni del Castello Sforzesco) ont été présentés avec le tableau à l’exposition Rabisch (1998, p. 285-286, nos. 106, 107, 108). Le tableau, dont le sujet est attesté par la description qu’en donne le peintre et écrivain milanais, Giovan Paolo Lomazzo (1538-1592) dans un de ses Rabisch, a fait l’objet d’une étude exhaustive de Maria Teresa Fiorio lors de l’exposition sur Le Grotesque dans l’art du seizième siècle qui eut lieu à Lugano, en 1998. Le début du texte de Lomazzo nous indique, outre le nom du peintre, celui du commanditaire :« IN RÒD D’ONA PINCIURA / FACCIA DAR SIMOGN PETREZAGN / AR SIGNÒ GERÒLLEM LEGNAN / IN RENGUA TOSCANA », ce dont on peut juger plus facilement d’après la traduction qu’en a donnée le professeur Dante Isella : « In lode d’un dipinto fatto da Simone Peterzano per Gerolamo Legnani ». Suit une description très détaillée du tableau en « langue toscane », notant l’attitude des deux héros, la présence des guerriers aux alentours et l’ombre et la lumière du soleil levant, qui correspondent effectivement en tout point au tableau (1). Le peintre Simone Peterzano est aujourd’hui davantage connu pour avoir été le maître de Caravage (1571-1610),que pour son œuvre en elle-même. Caravage fréquente l’atelier de l’artiste à Milan, entre 1584 et 1589 date à laquelle Peterzano part pour Rome, peut-être en compagnie de son élève. L’artiste, au hasard de ses signatures, se proclame «bergamasque» d’origine, ailleurs élève de Titien », autant d’affirmations non documentées, et en particulier pour son apprentissage auprès de Titien (1488/89 -1576)(2). Pourtant, il a toute chance d’être réel tant le vénétisme est présent dans les premières œuvres, pas seulement celui de Titien mais aussi celui de Véronèse (1528-1588) et celui des grands peintres du XVIe siècle vénitien. Quant au commanditaire, de nouveaux développements ont été apportés par Robert S. Miller qui publie, après l’exposition Rabisch, le contrat du 8 novembre 1572 pour les fresques de l’église du couvent de San Maurizio à Milan, contrat dans lequel se trouve cité à nouveau Gerolamo Legnani, cette fois-ci comme garant de l’artiste dans le cas où le contrat ne serait pas respecté. Ce texte précise encore qu’il s’agit d’un personnage de la noblesse, sans doute le premier commanditaire d’importance de l’artiste à Milan. Arslan qui avait publié le tableau pour la première fois en 1959, avait proposé une datation contemporaine des vers de Lomazzo, autour de 1585, alors que le lien avec les fresques de San Maurizio nous invite à envisager une datation bien antérieure, autour de 1575 comme l’avait déjà proposé Maria Teresa Fiorio lors de l’exposition Rabisch. Dans sa dernière intervention sur le tableau (en 2000) elle revient sur la datation pour apporter un élément nouveau. Compte tenu de la description extrêmement précise qu’en fait Lomazzo - jusque dans les détails de la lumière - il paraît évident qu’il en ait eu une vision directe, or l’on sait qu’il devint aveugle peu avant le 26 avril 1572 (3). Et, comme de plus, Lomazzo prend soin d’en indiquer le propriétaire, il faut donc imaginer que le collectionneur était déjà en possession du tableau, avant même la signature du contrat pour les fresques de San Maurizio. Cette argumentation sur la datation est de la première importance, car à cette date, Peterzano n’est pas encore résident légal à Milan ce que trahit sa peinture, encore très liée à l’art vénitien. Avant qu’Arslan ne rende le tableau à Peterzano, il passait d’ailleurs pour une œuvre de Véronèse, dont le souvenir reste cependant présent dans le personnage féminin d’Angélique. Le chromatisme intense, en particulier le drapé jaune aux effets glacés, la frondaison traitée d’un pinceau large qui s’oppose à la finesse de la description du premier plan et de l’échappée de paysage, sont encore autant d’échos de la technique picturale vénitienne. La scène représentée s’inspire du chant 19 (20-36) de l’Orlando Furioso de l’Arioste, un long poème publié en 1516,source inépuisable de sujets pour la peinture. Ici le groupe d’Angélique et Médor revisite le thème de la Pietà sur un mode « chevaleresque ». Par le jeu des regards et des mains le peintre exprime la compassion d’Angélique pour Médor, blessé à la suite d’une violente bataille entre chrétiens et sarrasins. En toile de fond, il s’agit pourtant d’évoquer un amour naissant entre la belle héroïne chrétienne et le jouvenceau païen. A droite, gisent les corps des compagnons de Médor, le roi Dardinel et le fidèle Cloridan qu’un personnage - s’agit-il du berger qui vient en aide à Angélique ? - tente de soulever. Dans cette partie du tableau, pointe le naturalisme de Peterzano par le bel effet de lumière à travers les feuillages qui se reflète sur l’épaule du berger, d’un coup de pinceau blanc et énergique, alors que l’avant du corps est plongé dans l’ombre. Les trois dessins préparatoires, publiés par Maria Teresa Fiorio, indiquent à quel point l’artiste était soucieux de définir au mieux les attitudes et les expressions : pour la première feuille le pathos du héros et pour la seconde, le rendu de son corps abandonné. Le dessin sert l’expression - il n’est pas au service d’un concept idéal - comme le démontrent encore les distorsions anatomiques des trois personnages de droite, déjà présentes sur le troisième dessin préparatoire, et qui sont à mettre, elles aussi, sur le compte de cette nouvelle orientation de son art alors qu’il est à peine arrivé à Milan. Les études pour les figures isolées sont légions dans son œuvre dessinée qui compte un nombre très élevé de feuilles (aujourd’hui dans la collection du Castello Sforzesco de Milan) et qui, souvent, proposent des variations autour d’une même figure. Avec ce tableau qui opère, tôt dans sa carrière, une synthèse entre les expériences vénitiennes et les nouveaux accents lombards, il s’agit de la redécouverte d’une des rares pages profanes de l’artiste, comme l’est aussi la Vénus et l’Amour avec deux satyres dans un paysage (Milan, Pinacothèque de Brera), légèrement antérieure à notre composition (4). Notes : 1- Giovan Paolo Lomazzo, Rabisch, Milan, éd. Isella, Turin, 1993, p. 153-154, n° II 36. La description en est la suivante : « Quando gionse a Simon l’alto capriccio / Del far del bel Medor ferito un quadro, / Pinsel col capo chin sopra il leggiadro / Grembo della sua donna, che sen stava / Dogliosa, e lui mirava ; / Et egli lei, ma con la bocca aperta, / Col dir, Questa è l’offerta / Che a me fai senza alcun merto mea. / Intanto ella la man bianca tenea / Sopra il lui collo, et ei co’ membri lassi / Pallido in terra stassi. / Veggonsi intorno uccisi e vivi finti, / Con gl’arbor dal Sol tinti, / Onde per l’ombre e i lumi in modo l’opra / Scode che longi ognun convien la scopra ». 2- « Simone Petrazana bergamasco » : Peterzano signe de la sorte le contrat avec la Fabbriceria de l’église de S. Maria presso S. Celso pour les peintures du buffet d’orgue (aujourd’hui perdues) : (Edi Baccheschi, « Simone Peterzano. La vita », I Pittori bergamaschi dal XIII al XIX secolo. Il Cinquecento IV, Bergame, 1978, p. 473). Pour de nouvelles découvertes d’archives sur les dates de l’artiste : voir Robert S. Miller, « Birth and Death Dates of Simone Peterzano », Paragone, janv.-mars 2002, nos. 41-42, p. 157-158. Sur son Autoportrait l’artiste se déclare ostensiblement « Venetus. Titiani. Alumnus » (voir Maurizio Calvesi, « Un autoritratto di Simone Peterzano », Studi di Storia dell’ Arte in onore di Denis Mahon, Milan, 2000, p. 37-39). 3- Francesco Porzio, in Rabisch, cat. exp., 1998, p. 316, n° 125. 4- Frank Dabell, 1990, p. 50 et Mina Gregori, 2002, p. 25, note 21.