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Louis Dorigny (Paris, 1654 - Verona, 1742)

(Paris,1654 - Verona,1742)

Pan et Syrinx

Huile sur toile, 146,7 x 113,5 cm.

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PROVENANCE


Collection particulière.

BIBLIOGRAPHIE


- Emilio Negro – Nicosetta Roio, Alessandro Marchesini 1663-1738, Modène, 2010, fig. p. 14.

DESCRIPTION


L’épisode mythologique représenté met en scène Pan et Syrinx et trouve sa source dans le récit d’Ovide (Les Métamorphoses, I, 691). Le poète latin situe l’action en Arcadie, là où le dieu satyre se met en chasse de poursuivre la nymphe Syrinx habituée à « déjouer les poursuites des satyres eux-mêmes et des dieux de toute sorte ». Elle échappe à Pan « qui se croyait maître de Syrinx qu’il venait de saisir». Alors qu’elle réussit à atteindre le fleuve Ladon, « elle prie les nymphes des eaux, ses sœurs, de la métamorphoser », ce qu’annoncent les roseaux au premier plan, symbolisant sa destinée et son apparence finales.
La dynamique du geste de Pan saisissant Syrinx tout en écartant les roseaux, le groupe cadré di sotto in su et en plan resserré nous placent résolument dans une esthétique baroque, typique de l’artiste qui tend souvent au spectaculaire. Sa grande main gauche, bien mise en évidence sur le drapé jaune safran semble freiner la fuite de Syrinx. Le mouvement, l’élan vertical de la figure féminine, n’est pas sans évoquer le groupe sculpté d’Apollon et Daphné du Bernin ayant pour sujet une autre métamorphose féminine (Rome, galleria Borghese). Ici, Syrinx est sur le point d’être changée en roseaux : les tiges aux feuilles caractéristiques, vertes et très allongées, sortent de sous son pied droit et commencent à lui faire une sorte de barrière de protection autour du corps. L’opposition entre la peau laiteuse de Syrinx et celle, brune du satyre dont le corps, au second plan, se confond avec le fond, contrebalance merveilleusement ce duo.
Le vigoureux dessin, amplifié de drapés aux plis cassés avec des arrêtes vives, comme s’il s’agissait d’une sculpture, l’expression aux yeux implorants, bouche entrouverte et bras agités dans un mouvement d’impuissance : tous évoquent la figure féminine d’une des lunettes représentant Daniel disculpant Suzanne, exécutées par Louis Dorigny à partir de 1693, dans la capella dei Notai au Palazzo del Comune de Vérone1. Tout comme dans notre duo, la psychologie qui se dépeint sur les visages est un acteur important du récit. Le léger tissu blanc, laissant en partie à découvert le corps de la jeune fille, marque la dimension sensuelle, indispensable à l’histoire et qui s’exprime aussi par le regard et l’expression de convoitise du satyre, pensant être sur le point d’arriver à ses fins. Mais déjà, et sans qu’il s’en doute le moins du monde, Syrinx va lui échapper…
Issu d’une famille d’artistes, Louis est le fils du peintre Michel Dorigny (1617-1665), qui avait épousé l’une des filles de Simon Vouet (1590-1649), et frère de Nicolas Dorigny (1658-1746), lui aussi peintre et graveur. Il apprit le métier avec son père, puis avec Charles Le Brun (1619-1690)2. A dix-sept ans, c’est déjà un jeune artiste formé qui se présente pour le prix de l’Académie royale de peinture et de sculpture de Paris et bien qu’il y fut admis en 1663, il fut déçu d’y avoir obtenu seulement un second prix. De sa propre initiative, il partit à Rome. Il séjourne dans la ville éternelle de 1672 à 1676, en copiant les merveilles qu’elle recèle. Puis, une longue pérégrination le mènera de Rome vers le nord de l’Italie, Gubbio, Foligno, Livorno, Venezia. Là, il s’y marie en 1683 et passe dix ans, pour s’installer finalement à Verone vers 1690. Là, Louis Dorigny a travaillé à la décoration de la résidence du marchand Giovanni Leoni Montanari (avec Alessandro Marchesini et d’autres, il avait déjà pris part au cycle décoratif de la Chiesa di S. Niccolo, toujours, à Verone).
En 1704, il fait un séjour d’un an à Paris pour voir sa famille. Sur le voyage du retour, il va à Naples en 1706, où il rend visite à Francesco Solimena (1657-1747). Après son retour à Vérone, la renommée de ses pinceaux le portera jusqu’à Vienne, en 1711, pour participer à la décoration du palais du prince Eugène de Savoie. Artiste passé maître dans la réalisation de le fresque, sa production fut abondante, même si en partie détruite aujourd’hui.

Notes:
1- Paola Marini (a cura di), Louis Dorigny 1654-1742. Un pittore della corte francese a Verona, Vérone, Museo di castelvecchio, Sala Goggian, 28 juin – 2 novembre 2003, p. 100-101, n° et fig. 5.
2- Voir la biographie commentée de l’artiste par Stéphane Loire, « Antoine – Joseph Dezallier d’Argenville, biographie de Louis Dorigny », Verona illustrata, 20, 2007, p. 67-86.